L'accord conclu entre Paris et Abu Dhabi rapportera 1 milliard d'euros aux musées de France, à charge pour eux d'aider l'émirat à se doter d'un établissement culturel de pointe.
Andy Warhol, qui aimait étonner son entourage avec des phrases péremptoires, prédisait qu'« un jour, les grands magasins seraient des musées et les musées des grands magasins ». La phrase conforte les opposants au projet du Louvre-Abu Dhabi, qui en dénoncent les « dérives commerciales ». « Le Louvre a toujours eu un rôle central dans la diplomatie culturelle de la France et a vécu au rythme de la vie politique du pays tout en contribuant à son rayonnement », rétorquait Renaud Donnedieu de Vabres, alors ministre de la Culture, en venant signer, le 6 mars dernier à Abu Dhabi, le contrat entre la France et les Emirats arabes unis pour la création d'un « Louvre du Golfe », vaste musée à vocation universelle, dont l'ouverture est prévue à l'horizon 2012. Un partenariat qui rapportera aux musées français 1 milliard d'euros versé par les Emirats.
L'accord a été validé dans l'une des suites de l'Emirates Palace, énorme et kitschissime pâtisserie où était exposée la maquette du futur et grandiose complexe muséal. Il s'élèvera sur l'île de Saadiyat (l'île du Bonheur en arabe), située en face des rivages d'Abu Dhabi. Aujourd'hui inhabité, ce site de 27 kilomètres carrés sera relié à la terre ferme par un pont et une autoroute à dix voies. Il sera peuplé d'hôtels (on nous promet un 7 étoiles), de restaurants, de deux terrains de golf, de marinas, de plages de sable fin, de parcs, d'une biennale d'art et, le long du front de mer, de quatre musées édifiés par les stars de l'architecture contemporaine : un centre pour les Arts vivants (danse, théâtre...) confié à Zaha Hadid, une architecte britannique d'origine irakienne, un musée de la Mer, qui promet d'être spectaculaire puisqu'en partie immergé, réalisé par le Japonais Tadao Ando, un musée d'Art moderne et contemporain, géré par la Fondation Guggenheim, imaginé par Frank Gehry. Et le Louvre-Abu Dhabi, conçu par Jean Nouvel, l'architecte de l'Institut du monde arabe et du musée du Quai Branly. Son coût sera de 83 millions d'euros payés par l'émirat.
Voilà pour l'extérieur. Le contenu de ces musées, celui du Louvre-Abu Dhabi plus que tout autre, a suscité débats et controverses. D'anciens conservateurs, aujourd'hui à la retraite, se sont émus : « Le Louvre n'est pas un réservoir d'oeuvres que l'on pourrait utiliser pour des raisons politiques, diplomatiques ou financières. » « Nous avons toujours fait de grands dépôts dans les musées de province ou à l'étranger, leur répond Henri Loyrette, président-directeur du Louvre. Nous avons pratiqué de longue date une importante politique de prêts pour des expositions temporaires avec des musées français et étrangers. Un projet comme Abu Dhabi s'inscrit dans la continuité de cette politique quasi bicentenaire. » Il n'était pourtant pas raisonnable de laisser le Louvre porter seul ce projet. Les discussions ont donc été menées d'Etat à Etat, pilotées par le ministère de la Culture, pour que l'ensemble des musées nationaux apportent leur aide et leur savoir-faire. Sont donc aussi concernés, à Paris, les musées du Quai Branly, d'Orsay, de Versailles, les musées Guimet et Rodin, le Centre Pompidou et la Bibliothèque nationale de France, et, en province, le domaine de Chambord, les musées de Bordeaux, Lille et Nantes parmi beaucoup d'autres. Ces musées sont regroupés dans une société créée spécialement pour la situation, l'Agence internationale des musées de France, présidée par Marc Ladreit de Lacharrière, mécène à qui l'on doit la restauration de plusieurs salles du Louvre et le financement de la récente exposition « Praxitèle ». Par le biais de cette Agence, la France s'engage à prêter à Abu Dhabi des oeuvres durant dix ans. Pendant les deux premières années, 300 pièces seront exposées dans l'émirat. Elles resteront sur place de trois mois à deux ans maximum. Le nombre de prêts décroîtra ensuite tous les deux ans jusqu'à devenir nul au bout de dix ans. La France s'engage en outre à fournir quatre expositions temporaires par an pendant dix ans. Quant aux thèmes de ces expositions, ils devront sans doute tenir compte des règles de la charia. « Les Emiriens n'ont pas formulé de demandes précises », affirme Vincent Pomarède, directeur du département des peintures du Louvre. « L'accord prévoit de présenter des objets majeurs dans les domaines de l'archéologie, des beaux-arts et des arts décoratifs répondant aux critères de qualité du Louvre et des grands musées français. Mais il va de soi, ajoute Vincent Pomarède, que nous éviterons de présenter dans les émirats une exposition sur l'érotisme dans l'art. »
Que va faire le Louvre de cette manne tombée du désert ? S'agrandir en récupérant une partie du pavillon de Flore (côté Seine), aujourd'hui occupé de manière incongrue par le Laboratoire de recherche des musées de France, créer un grand centre de réserve et de restauration pour mettre à l'abri les oeuvres des musées qui, comme le Louvre et Orsay, sont situés en zones inondables. Et surtout, retrouver un pouvoir d'acquisition d'oeuvres d'art face à un marché international qui atteint des sommes astronomiques. Autant de bonnes raisons pour se réjouir que le contrat entre les Emirats et la France soit bouclé. Selon un négociateur proche du dossier, un autre projet aurait été proposé à Cheikh Sultan bin Tahnoon et aux membres de la famille royale : quatre très grands musées proposaient de s'associer et de jouer de la diversité de leurs collections pour offrir à Abu Dhabi un musée d'art classique d'une variété extraordinaire. Les quatre grands étaient l'Ermitage de Saint-Pétersbourg, le Prado de Madrid, le Kunsthistorisches Museum de Vienne et le musée du Palais de Topkapi à Istanbul. S'ils ne l'ont pas emporté, c'est que bien peu de musées peuvent, comme le Louvre, se targuer d'être une « marque ». C'est cette notoriété que les émirs d'Abu Dhabi sont venus chercher sur les bords de la Seine. L'épisode prouve, en tout cas, que l'exportation des musées se banalise : le Centre Pompidou à Shanghaï, le British Museum à Pékin, le musée Rodin au Brésil, l'Ermitage à Amsterdam. La mondialisation s'applique aussi aux beaux-arts.
Nous aimerions exporter nos conflits Libanais quelque part d'autre dans le monde?
On fait des soldes si quelqu'un est interessé...
3 commentaires:
I'm all for it. And I also believe it's about time that the Hezbollah "Spider's Web"/"Divine Victory" war museum of Haret Hreik is exported to Antartica.
I've been to this exhibition, i must say it was quite impressive...of course pictures were allowed...So i took as many as i could...i would like to know if they did it in Iran and Syria...(They surely did...)
yo yo
hisbollah on the ground!!!
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